Le slow travel s’impose aujourd’hui comme une alternative crédible à la frénésie touristique. Face à l’urgence climatique, à la fatigue mentale et à l’overdose de city breaks, voyager moins vite, plus près et plus longtemps devient un véritable choix de société. Ce mouvement n’a rien d’une lubie bobo : il répond à des enjeux très concrets de bien-être, de budget, mais aussi de responsabilité environnementale. Voyager lentement, c’est transformer le trajet en expérience, limiter l’empreinte carbone, et surtout retrouver le plaisir de la découverte sans se sentir pressé par le temps ou par une to‑do list interminable. Pour beaucoup, cette approche du voyage lent agit comme un antidote au « toujours plus » et redonne au voyage sa dimension profonde : comprendre, ressentir, s’ancrer.

Définition du slow travel : origine du mouvement, principes clés et différences avec le tourisme de masse

Genèse du slow travel : du mouvement slow food en italie aux pionniers du voyage lent en europe

Le slow travel trouve ses racines dans le mouvement Slow Food, né en Italie à la fin des années 1980 en réaction à l’implantation d’un fast-food près de la Piazza di Spagna à Rome. L’idée initiale était simple : défendre les cuisines locales, le temps long du repas et la convivialité face à la standardisation. Cette philosophie de la lenteur s’est ensuite déclinée en slow life, slow city, puis naturellement en slow tourism et slow travel. En Europe, les premiers adeptes du voyage lent ont souvent été des randonneurs au long cours, des cyclotouristes et des voyageurs en train de nuit qui ont remis le temps de trajet au cœur de l’expérience, bien avant que la crise climatique ne s’impose dans le débat public.

Principes fondamentaux du slow travel : lenteur, immersion, sobriété, sobriété carbone et ancrage local

Le slow travel repose sur quelques piliers simples mais exigeants. La lenteur d’abord : rester plus longtemps dans un même lieu, accepter de ne pas tout voir, préférer un village bien exploré à cinq capitales survolées. Ensuite, l’immersion : prendre le temps de rencontrer les habitants, de fréquenter les marchés, les cafés de quartier, les fêtes locales plutôt que d’enchaîner les attractions « incontournables ». La sobriété matérielle et la sobriété carbone sont également centrales : voyager plus léger, limiter les vols, privilégier le train, le vélo ou la marche. Enfin, l’ancrage local : choisir des hébergements indépendants, des restaurants de proximité, des activités qui soutiennent l’économie résidentielle plutôt qu’un tourisme extractif et standardisé.

Comparaison slow travel / city break express : temps de séjour, densité d’activités et empreinte écologique

Le contraste entre slow travel et city break express est saisissant. Un city break typique de 3 jours en avion dans une capitale européenne implique souvent 2 vols moyen‑courriers, 5 à 10 activités programmées, des réveils tôt et des journées denses. Le voyageur revient souvent fatigué, avec des centaines de photos mais un souvenir flou de ce qu’il a vraiment ressenti. À l’inverse, un séjour slow de 7 jours dans une seule région, accessible en train, comporte moins de déplacements, 1 à 3 activités majeures par jour et de larges plages de temps libre. L’empreinte carbone peut être divisée par 5 à 10 selon la distance. Cette différence se prête bien à une lecture chiffrée.

Type de séjour Durée moyenne Nb de déplacements majeurs Activités/jour Empreinte carbone approximative*
City break express (avion) 3 jours 2 vols + 6 à 8 trajets urbains 5 à 7 300–600 kg CO₂e
Séjour slow travel (train) 7 jours 2 trajets train + déplacements doux 2 à 3 40–100 kg CO₂e

*Ordres de grandeur pour un Paris–Barcelone selon le mode de transport et les comportements sur place.

Cadre théorique : tourisme durable, tourisme responsable, tourisme low impact et slow tourism

Le slow travel s’inscrit dans la famille du tourisme durable, qui vise à concilier besoins des voyageurs, protection de l’environnement et retombées économiques locales. Il se rapproche aussi du tourisme responsable, centré sur le respect des populations, ainsi que du tourisme low impact, qui cherche à réduire au maximum les effets négatifs (carbone, déchets, pression sur les écosystèmes). Le slow tourism peut être vu comme la mise en pratique concrète de ces concepts : il combine décarbonation, meilleure répartition des flux et valorisation du patrimoine vivant. De nombreux territoires européens développent aujourd’hui des stratégies slow, avec des itinéraires cyclables structurés, des labels pour hébergements engagés, ou encore des politiques de désaisonnalisation pour lisser la fréquentation.

Dimensions psychologiques et conscientes du slow travel : présence, rapport au temps et déconnexion numérique

Vivre le voyage en pleine conscience : pratiques de mindfulness en randonnée, train de nuit ou itinérance à vélo

Le slow travel ouvre un espace idéal pour la pleine conscience en voyage. La marche, la randonnée ou l’itinérance à vélo offrent une cadence naturelle qui aide à revenir au corps : le rythme des pas, la respiration, la sensation du vent ou de la pluie sur la peau. Dans un train de nuit, le bercement régulier, le léger grincement des rails, les lumières qui défilent créent un environnement propice à la méditation. Une pratique simple consiste à s’ancrer dans les cinq sens : observer les couleurs du paysage, écouter les sons les plus proches puis les plus lointains, sentir les odeurs, toucher les matières, goûter les spécialités locales en silence quelques instants. Ce type de mindfulness en voyage transforme un simple trajet en expérience intérieure.

Réapprivoiser le temps long : gestion du FOMO, ralentissement du rythme et réduction de la charge mentale en voyage

L’un des freins majeurs au slow travel reste le FOMO, cette peur de « rater quelque chose ». Les réseaux sociaux renforcent cette sensation en mettant en avant des listes de « 10 choses à faire absolument » dans chaque destination. Pourtant, accumuler les lieux ne garantit pas une expérience plus riche. Le temps long permet justement de réduire la charge mentale en voyage : moins de réservations à gérer, moins de contraintes horaires, plus de flexibilité. Bloquer volontairement des « journées off » sans programme, accepter de rester au même café une heure de plus, renoncer à un site touristique pour flâner dans un parc sont autant de micro‑décisions qui allègent le cerveau. Comme en randonnée, avancer moins vite permet souvent d’aller plus loin dans la compréhension d’un territoire.

Digital detox en déplacement : limiter les écrans, privilégier le carnet de voyage et les cartes papier

Les smartphones transforment souvent le voyage en marathon de notifications : messages, photos à poster, itinéraires à optimiser. Le slow travel encourage une forme de digital detox : activer le mode avion pendant des plages entières, basculer les cartes en mode hors ligne, utiliser une carte papier pour retrouver une lecture plus globale de l’espace. Tenir un carnet de voyage manuscrit, coller des tickets de train, dessiner un croquis remplace avantageusement le réflexe de tout photographier. Une stratégie simple consiste à définir des « fenêtres numériques » (par exemple 30 minutes le matin, 30 minutes le soir) et à laisser le reste du temps libre d’écran. La sensation de présence au lieu s’en trouve radicalement renforcée.

Impact sur le bien‑être : stress, fatigue décisionnelle, charge cognitive et ressenti post‑voyage

Psychologiquement, le slow travel agit comme un régulateur. Des études sur la fatigue décisionnelle montrent que multiplier les choix dans une journée (où manger, quoi visiter, par quel itinéraire passer) épuise le cerveau et augmente le stress. Un itinéraire lent, avec un périmètre plus restreint et moins de déplacements, réduit drastiquement ce nombre de micro‑décisions. Le ressenti post‑voyage en est transformé : au lieu de revenir avec la sensation d’avoir besoin de « vacances après les vacances », beaucoup de voyageurs rapportent une meilleure qualité de repos, un niveau de stress plus bas et une impression de cohérence entre valeurs et pratiques. En quelque sorte, le slow travel agit comme une cure de désaturation mentale.

Slow travel et mobilité douce : privilégier train, vélo, marche et cabotage plutôt que l’avion

Voyager en train en europe : interrail, TGV inoui, trenitalia, renfe, nightjet et lignes de trains de nuit

Le train constitue l’épine dorsale de la mobilité douce en Europe. Pour un voyage long‑courrier sans avion en Europe, le pass Interrail offre une grande flexibilité : plusieurs formules permettent de combiner TGV Inoui, trains régionaux, Nightjet autrichiens, Trenitalia en Italie ou Renfe en Espagne. Les trains de nuit connaissent d’ailleurs un renouveau depuis quelques années, avec la réouverture de lignes comme Paris–Vienne ou Paris–Berlin. Le temps de trajet devient alors un temps de vie : lecture, contemplation, rencontres dans le wagon‑bar, sieste en couchette. Pour un voyageur en slow travel, le train n’est plus un « mal nécessaire », mais une partie intégrante de l’expérience, avec une empreinte carbone souvent 20 à 50 fois inférieure à celle de l’avion sur les mêmes distances.

Itinérance à vélo : EuroVelo 6, ViaRhôna, la vélodyssée, loire à vélo et voies vertes françaises

L’itinérance à vélo incarne parfaitement le voyage lent. Les grands itinéraires cyclables comme l’EuroVelo 6, la ViaRhôna, La Vélodyssée ou la Loire à Vélo offrent des centaines de kilomètres sur voies vertes et petites routes, avec un balisage de plus en plus qualitatif. À 15–20 km/h de moyenne, un road trip à vélo permet de traverser des villages, de s’arrêter devant une ferme, de discuter avec un producteur en bord de route, sans barrière physique. Le vélo électrique élargit encore le champ des possibles pour des profils moins sportifs ou des voyages en famille. Pour un slow traveler, l’itinérance cyclable conjugue liberté, sobriété carbone et immersion paysagère : chaque montée se paie d’une vue, chaque descente devient une récompense.

Randonnée et trek au long cours : chemin de compostelle, GR20 en corse, GR34 en bretagne, tour du Mont‑Blanc

La marche au long cours reste l’archétype du voyage en profondeur. Des itinéraires comme le chemin de Compostelle, le GR20 en Corse, le GR34 en Bretagne ou le Tour du Mont‑Blanc attirent chaque année des milliers de randonneurs en quête de temps long. Sur ces sentiers, le rapport à la distance et à l’effort change : 20 km par jour prennent une autre signification lorsque les pieds touchent chaque mètre du trajet. Le sac devient la maison, les gîtes et refuges des lieux de vie plutôt que de simples hébergements. Pour un projet de trek au long cours en Europe, le slow travel n’est même plus une option, il devient la seule façon possible de se déplacer, avec une empreinte environnementale minimale et une immersion maximale.

Cabotage et navigation lente : voilier habitable, péniche sur le canal du midi, croisières fluviales low impact

La navigation lente offre une autre dimension du slow travel. Le cabotage en voilier habitable le long des côtes, la location d’une péniche sur le canal du Midi ou une croisière fluviale sur la Loire ou le Danube permettent d’épouser littéralement le rythme de l’eau. La vitesse est limitée, les haltes sont fréquentes, les interactions avec les habitants des villages riverains nombreuses. Sur un bateau, la logistique impose la sobriété : gestion de l’eau, de l’énergie, des déchets. Ce cadre favorise une forme de minimalisme choisi et une attention accrue aux milieux traversés. C’est l’une des formes de voyage les plus cohérentes avec une démarche de tourisme low impact, à condition d’éviter les grands paquebots très polluants.

Calcul de l’empreinte carbone : comparatif train / avion / voiture, outils type « bon pote » ou « atmosfair »

Pour objectiver les choix de mobilité, certains outils de calcul carbone sont précieux. Des plateformes comme Atmosfair ou les calculateurs recommandés par des sites de vulgarisation comme Bon Pote permettent d’estimer l’empreinte d’un trajet. Un Paris–Berlin en avion représente ainsi autour de 600–700 kg CO₂e par personne, contre 40–60 kg en train et 120–200 kg en voiture à plusieurs. À l’échelle d’une année, remplacer ne serait‑ce que deux vols moyen‑courriers par des voyages en train réduit significativement le bilan carbone individuel. Pour un slow traveler, ces chiffres servent de boussole : ils aident à prioriser les destinations accessibles en mobilité douce et à assumer, en conscience, les rares vols conservés.

Choix des destinations slow travel : territoires, micro‑aventures et exemples d’itinéraires lents en france et en europe

Voyager lentement en france : cévennes, aubrac, vallée de la dordogne, parc naturel du queyras, morvan

La France offre un terrain idéal pour le slow travel, avec une densité de paysages et de cultures accessible en quelques heures de train. Les Cévennes et l’Aubrac se prêtent à des séjours de randonnée et de transhumance, avec des villages préservés et une forte identité paysanne. La vallée de la Dordogne, ponctuée de bastides, de châteaux et de falaises, se découvre à canoë ou à vélo. Le parc naturel du Queyras, dans les Hautes‑Alpes, permet un séjour slow en montagne loin des grandes stations, avec des refuges conviviaux et un patrimoine pastoral vivant. Le Morvan, enfin, incarne la France des forêts et des lacs, parfaite pour un mix de balades, baignades et découvertes de produits du terroir.

Destinations slow en europe : toscane, alentejo, cyclades hors saison, îles lofoten, slovénie verte

En Europe, certaines régions se prêtent particulièrement à un voyage lent. La Toscane, au-delà de ses villes d’art, offre un maillage de villages, d’agritourismes et de routes secondaires propices à l’itinérance à vélo ou en bus local. L’Alentejo au Portugal séduit par ses plaines, ses villages blancs et ses plages sauvages, encore relativement épargnés par le tourisme de masse. Les Cyclades hors saison, en particulier au printemps et à l’automne, permettent de redécouvrir ces îles sous un jour plus authentique. Les îles Lofoten, en Norvège, imposent par leur isolement une forme de sobriété : météo changeante, distances limitées, respect des écosystèmes fragiles. La Slovénie, souvent présentée comme une « Slovénie verte », mise quant à elle sur le tourisme durable avec des parcs naturels, des hébergements écolabellisés et une offre de mobilité douce structurée.

Micro‑aventures à moins de 3h de train de paris : vallée de chevreuse, baie de somme, alsace à vélo, jura

Le concept de micro‑aventure répond parfaitement à la logique slow travel pour celles et ceux qui disposent de peu de temps. À moins de 3 heures de train de Paris, la vallée de Chevreuse offre sentiers, châteaux et forêts pour un week‑end de randonnée ou de vélo. La baie de Somme propose un mélange unique de marais, de plages et de villages de pêcheurs, idéal pour observer oiseaux migrateurs et phoques. L’Alsace se prête merveilleusement à un itinéraire à vélo entre Strasbourg, Colmar et les villages viticoles, sur des pistes dédiées. Le Jura, enfin, accessible en train jusqu’à Dole ou Lons‑le‑Saunier, permet d’organiser une micro‑aventure mêlant lacs, cascades et dégustation de fromages et de vins locaux.

Saisonnalité et désaisonnalisation : voyager hors haute saison à barcelone, lisbonne, amsterdam ou dubrovnik

Choisir le bon moment est un levier puissant de slow travel. Voyager hors haute saison à Barcelone, Lisbonne, Amsterdam ou Dubrovnik change radicalement l’expérience. La pression sur les infrastructures baisse, les prix se stabilisent, les habitants retrouvent une relation plus apaisée avec les visiteurs. Pour un séjour hors saison en Europe du Sud, l’automne et le début du printemps offrent souvent un climat doux, moins de foule et une luminosité intéressante pour la photographie. D’un point de vue environnemental, la désaisonnalisation permet aussi de lisser les pics de fréquentation, de réduire les phénomènes d’overtourisme et de mieux répartir les retombées économiques sur l’année.

Immersion locale et rencontres : hébergement, gastronomie, tourisme communautaire et économie résidentielle

Hébergements slow : chambres d’hôtes, gîtes ruraux, écolodges, woofing, agritourisme en toscane ou en dordogne

Le choix d’hébergement conditionne fortement le degré d’immersion. Les chambres d’hôtes, gîtes ruraux et écolodges permettent un contact direct avec des habitants, souvent ravis de partager leurs bons plans, leur histoire et leurs recettes. En Toscane ou en Dordogne, l’agritourisme offre la possibilité de loger dans une ferme, au milieu des vignes ou des vergers, avec parfois participation aux travaux agricoles. Des dispositifs comme le woofing vont plus loin en proposant un échange travail/logement, intéressant pour des séjours longs et à budget réduit. Dans tous ces cas, l’argent dépensé reste sur le territoire et soutient une économie résidentielle plutôt que des chaînes internationales.

Gastronomie et circuits courts : fermes auberges, tables d’hôtes, marchés paysans, labels AOP/AOC

La gastronomie locale est un formidable vecteur d’immersion. Les fermes‑auberges et tables d’hôtes servent souvent des produits issus de leurs propres cultures ou d’un réseau de producteurs voisins. Les marchés paysans permettent de rencontrer directement les artisans, de poser des questions sur les méthodes de production, de découvrir des variétés anciennes. Les labels AOP/AOC, bien qu’imparfaits, restent des repères utiles pour repérer des produits ancrés dans un terroir. Intégrer une dimension slow food à un voyage slow, c’est privilégier les circuits courts, les produits de saison et les lieux où le temps du repas est encore un moment social, loin des chaînes standardisées.

Tourisme communautaire et solidaire : séjours avec village monde, TDS voyages, tourism for good

Le tourisme communautaire propose des séjours construits avec et pour les communautés locales. Des organisations comme Village Monde, TDS Voyages ou Tourism for Good soutiennent des projets où les habitants gardent la maîtrise de l’accueil, des activités et des retombées économiques. Pour un voyageur en quête de tourisme solidaire, ces formats permettent de sortir de la logique de consommation rapide de la destination. L’expérience peut aller d’une immersion dans un village de montagne à un séjour dans une communauté de pêcheurs, avec des ateliers, des échanges culturels et parfois des actions de volontariat encadrées. L’enjeu est alors de rester dans une posture d’invité, non d’expert ou de sauveur.

Participation à la vie locale : ateliers d’artisans, vendanges, transhumance, fêtes de village et festivals

Participer à la vie locale transforme la perception d’une destination. Des ateliers d’artisans (poterie, tissage, sculpture, cuisine traditionnelle) offrent une porte d’entrée sur les savoir‑faire. Les vendanges ou la transhumance, lorsqu’elles sont organisées dans un cadre respectueux, permettent de partager un moment fort du calendrier agricole. Les fêtes de village, festivals, marchés de nuit ou processions religieuses donnent à voir des dimensions souvent absentes des brochures touristiques. Pour un slow traveler, ces expériences valent parfois plus qu’une visite de monument emblématique. Elles créent des souvenirs incarnés, liés à des visages, des voix, des gestes, plutôt qu’à des façades photographiées à la chaîne.

Voyager lentement, c’est passer du statut de consommateur de lieux à celui d’invité temporaire dans un écosystème humain et naturel.

Organisation pratique d’un voyage en slow travel : planification, budget, logistique et sécurité

Choisir la durée de séjour et le périmètre géographique : rayon de 50 km, base camp et excursions en étoile

La première décision structurante concerne la durée et le périmètre. Une approche efficace consiste à définir un « base camp » – une ville ou un village bien desservi – et un rayon d’exploration d’environ 50 km. Dans ce périmètre, il devient possible d’organiser des excursions en étoile à la journée, en train régional, bus, vélo ou covoiturage. Cette méthode limite les changements d’hébergement, réduit les temps de trajet et offre une stabilité appréciable, notamment en famille. Pour un voyage lent de deux semaines, deux base camps suffisent largement à couvrir une grande région sans se sentir pressé. Le rayon de 50 km n’a rien de magique, mais il donne un ordre de grandeur compatible avec la mobilité douce.

Construire un itinéraire low stress : temps morts, marges de sécurité, journées « off » sans déplacement

Un itinéraire slow se construit comme un agenda apaisé. Insérer volontairement des temps morts entre deux déplacements, prévoir des marges de sécurité pour les correspondances, garder au moins une journée « off » tous les 3 ou 4 jours sans aucun engagement horaire réduit grandement le risque de stress. Une règle simple consiste à limiter à 2 ou 3 les « points forts » par jour : une visite, une activité, un repas dans un lieu choisi avec soin. Le reste du temps est laissé à la flânerie, aux imprévus, à la sieste. Cette manière de planifier ressemble davantage à une partition de jazz qu’à un planning militaire : une structure existe, mais elle laisse place à l’improvisation.

Budgetisation d’un voyage lent : coûts de transport, hébergement long séjour, cuisine autonome et passes ferroviaires

Contrairement aux idées reçues, le slow travel n’est pas nécessairement plus cher. En réduisant le nombre de destinations, les coûts de transport chutent : moins de billets, moins de transferts. Les hébergements de longue durée (à la semaine ou au mois) bénéficient souvent de tarifs dégressifs de 10 à 40 %. La possibilité de cuisiner sur place, surtout en Europe, fait baisser considérablement le budget restauration. Des passes ferroviaires comme Interrail, des cartes régionales ou des abonnements type TER dépendent de la zone, mais deviennent rentables dès quelques trajets. Pour un budget maîtrisé, l’enjeu principal consiste à arbitrer entre confort, flexibilité et empreinte carbone, en alignant au mieux ces trois dimensions.

Outils et applications utiles : Rome2Rio, rail planner, komoot, maps.me, applications SNCF connect et deutsche bahn

Un voyage lent n’exclut pas l’usage intelligent d’outils numériques. Des applications comme Rome2Rio donnent une vision d’ensemble des options de transport entre deux points (train, bus, covoiturage, ferry). Rail Planner est particulièrement pratique pour gérer un pass Interrail. Komoot ou Maps.me servent à préparer des itinéraires de randonnée ou de vélo, avec cartes hors ligne utiles en zone blanche. Les applications SNCF Connect ou Deutsche Bahn permettent de suivre en temps réel les trains et d’ajuster un trajet en cas de retard. Le slow travel ne consiste pas à revenir à l’âge de pierre, mais à utiliser la technologie comme un support discret, non comme un tyran.

La clé n’est pas d’avoir plus d’outils, mais de les consulter moins souvent pour laisser de l’espace à l’imprévu.

Enjeux environnementaux et éthiques du slow travel : décarbonation, overtourisme et régulation des flux

Réduction des vols moyen‑courriers intra‑européens : alternatives train pour Paris–Barcelone, Paris–Berlin, Paris–Milan

Les vols moyen‑courriers représentent une part importante de l’empreinte carbone touristique en Europe. Remplacer un Paris–Barcelone, Paris–Berlin ou Paris–Milan en avion par le train est une décision structurante pour un voyageur. Paris–Barcelone se fait en environ 7 heures de TGV, Paris–Milan en 7 heures également via Lyon ou Lausanne, Paris–Berlin en 8 à 10 heures avec une correspondance, parfois en combinant TGV et ICE. En intégrant le temps de trajet comme partie du séjour, ces durées deviennent acceptables, voire agréables. Une stratégie réaliste pour une transition vers un tourisme bas carbone consiste à se fixer un nombre maximum de vols par an et à privilégier systématiquement le rail en deçà d’un certain kilométrage.

Lutter contre l’overtourisme : éviter venise, santorin, dubrovnik en haute saison, privilégier des destinations émergentes

L’overtourisme fragilise des villes comme Venise, Santorin ou Dubrovnik, où la population résidente diminue, chassée par la pression immobilière et la monoculture touristique. Le slow travel invite à questionner la nécessité de visiter ces lieux au sommet de leur saturation. Voyager hors saison, choisir des quartiers moins centraux, voire opter pour des alternatives (îles moins connues, villes secondaires, campagnes voisines) participe à une meilleure répartition des flux. Une approche responsable de la destination suppose d’accepter que certains lieux soient temporairement ou durablement en situation de seuil critique, et que l’acte le plus respectueux puisse être de ne pas y aller, ou d’y aller autrement.

Rapport aux populations locales : consentement, respect des cultures, photographies, pourboires et négociation de prix

Le slow travel implique un rapport plus éthique aux habitants. Demander le consentement avant de photographier une personne, respecter les lieux de culte, adapter sa tenue, éviter de négocier de façon agressive pour quelques centimes dans des pays à faibles revenus sont des gestes simples mais significatifs. La question du pourboire doit se penser en fonction des usages locaux, sans imposer un modèle unique. Un voyageur lent gagne à adopter une posture d’écoute : observer d’abord, poser des questions ensuite, accepter de se tromper et de corriger son attitude. L’idée n’est pas d’être parfait, mais de tendre vers une interaction plus horizontale, moins extractive avec les populations visitées.

Indicateurs de durabilité touristique : capacité de charge, indice de surfréquentation, labels green destinations

De plus en plus de territoires s’appuient sur des indicateurs pour piloter leur développement touristique. La notion de capacité de charge renvoie au nombre maximal de visiteurs qu’un écosystème (ville, parc, île) peut absorber sans dégradation majeure. Des indices de surfréquentation croisent données de fréquentation, qualité de l’air, prix du logement, congestion des transports. Des labels comme Green Destinations ou équivalents nationaux cherchent à valoriser les destinations engagées dans une démarche de durabilité mesurable. Pour un voyageur, se renseigner sur ces indicateurs et intégrer ces données dans le choix d’un séjour slow travel permet d’aligner plus finement pratiques individuelles et enjeux collectifs.

Choisir une destination slow, c’est déjà poser un acte politique en faveur d’un modèle touristique plus juste et plus soutenable.